Les évènements de l’actualité se succèdent et donc se périment à grande vitesse. Et pourtant, nous en sommes friands, nous avons souvent peur de passer à côté d’une information. “Comment ça, tu n’es pas au courant” ? En revanche, nous sommes souvent bien moins attentifs aux choses de l’éternité.
Dans chaque Carême, nous entendons l’Evangile de la Transfiguration de Jésus. Pour Pierre, Jacques et Jean qui en sont témoins, cela aurait pu être seulement une actualité passagère dont ils avaient été les témoins privilégiés. Mais cela n’a pas été le cas. Ce temps particulier est resté inscrit très profondément dans leur coeur comme un moment d’éternité.
“Ô Temps, suspends ton vol” dit le poète touché un jour par l’amour. Le temps ne suspend jamais son vol, mais nous pouvons vivre certains moments comme des moments d’éternité si l’on croit que l’amour est éternel, si on croit que Dieu s’intéresse à l’histoire des hommes et s’y implique.
L’actualité peut donc être un écran ou un écrin pour l’éternité. Un écran si la dispersion de nos centres d’intérêt, et la captation de notre attention par des choses éphémères, nous empêchent d’orienter notre coeur vers Dieu, vers les choses éternelles. Un écrin si à l’intérieur même de nos quotidiens souvent chargés, nous sommes capables de réserver un temps exclusif pour le Seigneur, et que nous nous laissons habiter par son amour, sa présence.
C’est là une conversion de carême assez profonde : ne pas perdre son temps, ôter de sa vie ce qui empêche d’aller à l’essentiel, ne pas courir après les actualités pour ne pas courir après le temps, mais prendre dans mon temps limité des moments de coeur à coeur avec le Seigneur, pour que la succession de mes activités quotidiennes soit vécu en sa présence. Ce n’est qu’ainsi que mon quotidien devient capable de peu à peu se transfigurer. Cette éternité, les catéchumènes la désirent, eux qui passent tant de temps à se préparer à accueillir la grâce du baptême.
Cette éternité donne un sens à tous nos efforts de privation, de prière et de partage pendant le carême : Seigneur, je veux bien être privé de ceci ou de cela, pourvu que je ne sois jamais privé de Toi ! Bon carême.
Père Eric Courtois
