Évangile de Jésus-Christ selon saint Marc

Questions-réponses sur Marc 1,1-45

 

1,5 : « Ils confessaient publiquement leurs péchés ». Se confesser publiquement ? Coutume ou propre à Saint Jean-Baptiste ?

Au temps de Jean-Baptiste, il n’y avait pas de confessionnaux pour une confession auriculaire et individuelle offerte à ceux qui ne voulaient pas une confession publique : chacun, et ensemble, confessait (c’est-à-dire reconnaissait et affirmait) qu’il manquait à respecter la Loi. Beaucoup de psaumes sont des « confessions publiques ». Dans les « 18 bénédictions », le croyant juif demande à Dieu de pardonner ses fautes sans en faire une liste. Le baptême de Jean était un rite de « pénitence pour le pardon des péchés» (Marc 1,4). Le simple faite de demander le baptême de Jean était une confession publique d’être pêcheur.

 

1,6 : Quelle est la signification du vêtement en poil de chameau et de la nourriture de sauterelles de Jean-Baptiste qui fait référence au prophète Elie ?

C’est la description du vêtement « professionnel » d’un prophète. Jean est vêtu d’une manière différente, il mange de manière différente, il réside dans un endroit différent (le désert), et sa parole va donc est une parole différente des préoccupations humaines : il parle au nom de Dieu.

 

1,8 : Dans l’Ancien Testament, dans la religion juive au temps  de Jean-Baptiste, était-il déjà question du Saint Esprit ? Si oui, que représente-t-il ?

Les expressions françaises retenues par le judaïsme sont « Esprit de sainteté », « Esprit de Dieu », « Esprit du Seigneur ». L’Ancien Testament utilise ces expressions plus de 80 fois. C’est une manière de dire que Dieu donne sa force, sa sagesse, son intelligence… à des personnages de l’Histoire Sainte, et même à tous les fidèles : le midrash tanhuma écrit : « Tout ce que font les justes, ils le font grâce au pouvoir de l’Esprit de sainteté ». La foi chrétienne développera cela au concile de Constantinople (381) concernant l’Esprit Saint.

 

1,12 : Comment expliquer que Jésus soit envoyé par l’Esprit dans le désert pour y être tenté par Satan, juste après son baptême par Jean-Baptiste ? Pourquoi l’Esprit pousse Jésus dans le désert après le baptême ? Lien entre le baptême de Jean-Baptiste et le baptême chrétien ?

Il faut d’abord accueillir ce que disent les récits puis chercher à expliciter ce qu’ils signifient. En l’occurrence, ici, c’est un fait que les tentations de Jésus ont lieu APRES, et non pas AVANT son baptême. Donc les tentations ne sont pas des « épreuves » à surmonter pour accéder au baptême. C’est l’inverse. Par les autres évangélistes (Mt4, Lc4), nous savons que la pointe des tentations (« Si tu es le Fils de Dieu, fais ceci ou cela …») porte précisément sur ce qui a été manifesté au moment du baptême (« Tu es mon Fils bien-aimé …»). Pour nous, cela signifie sans doute que nous sommes aussi tentés par rapport à quelque chose que Dieu nous a déjà donné… Le baptême de Jean est un baptême de conversion pour le pardon des péchés. C’est donc une ultime préparation à l’Évangile, tandis que le baptême chrétien est en relation directe avec la mort et la résurrection de Jésus. Saint-Paul dira : « Par le baptême, nous avons été unis au Christ… à sa mort… pour que nous soyons unis aussi à sa résurrection… » (Rom 6,3-4). Jésus entre donc dans le baptême de Jean pour en transformer de l’intérieur le sens.

 

1,13 : Qui est ce Satan (« malin », « diable ») dont parle parfois Jésus ? Qu’en pense au juste l’Eglise Catholique ?

Satan est un esprit qui s’oppose à Dieu et nous pousse à nous opposer à Lui. Il est diviseur, menteur et homicide dès l’origine. L’Eglise en pense ce qu’en dit l’Évangile et même toute la Bible : il est actif, doué d’intelligence et de volonté, capacités qu’il met au service du mal, mais le Christ Jésus par sa croix a déjà remporté sur lui la victoire (cf Apocalypse), victoire à laquelle il nous associe en nous associant aussi à son combat précisément contre le mal et pour l’annonce de l’Évangile. Catéchisme de l’Eglise Catholique n° 391,2850 et suivants.

 

1,18. 20 : « Aussitôt » ? Ce mot revient plusieurs fois, est-ce l’interprétation de l’évangéliste ou autre chose ?

Vous trouverez 41 fois chez Marc, surtout dans la première moitié de l’Évangile, le mot grec traduit par « aussitôt ». C’est une expression, et une idée, employée surtout par Marc : Il n’y a pas de temps à perdre pour proclamer la Bonne Nouvelle et pour la vivre. « C’est maintenant le jour du salut» écrit Paul (2 Co 6,2 – 1 Co 7,29-31). Et moi qu’est-ce que je fais de mon temps ?

 

1,22 : Quelle est cette autorité avec laquelle Jésus parle (mentionné à plusieurs reprises) ?

Dans les sociétés antiques, l’autorité vient du fait que l’on s’inscrit dans une longue chaîne de traditions. Aujourd’hui encore, quand vous avez fait une grande école, avec des maîtres prestigieux, cela vous donne une certaine aura, une certaine autorité, au moins jusqu’au moment vous faites vos preuves (ou pas) par vos actions. Or l’Évangile ne dit rien de la formation de Jésus. Marie l’a sans doute formé, mais rien n’est dit. Et les gens se posent la question : « d’où lui vient cela» ? C’est que son autorité n’est pas reçue des hommes mais vient de Dieu. Il parle et agit avec l’autorité du Fils de Dieu !

 

1,23 : Que veut dire saint Marc avec ses esprits mauvais ? Représente-t-il le mal que Jésus est venu affronter ? La possession par les esprits semble courante à l’époque de Jésus. Comment la comprendre aujourd’hui ? Influence des croyants de l’époque ? Autre sens donné par Marc ?

Les esprits mauvais existent autant à notre époque qu’autant de Jésus. Ils ne représentent pas le mal ; ils sont le mal, comme tout ce qui s’oppose à Dieu est un mal. Simplement, le langage de l’époque dit les choses de manière plus directe que nous qui avons tendance à édulcorer les réalités invisibles. De plus, chaque fois que le bien se manifeste (et c’est évidemment le cas au plus haut point dans la personne de Jésus), les forces du mal se manifestent aussi avec force pour empêcher l’accomplissement du bien. C’est sans doute pour cela que la lutte fondamentale apparaît si clairement dans l’Évangile.

 

1,44 : A quel sacrifice Jésus fait-il référence ? « Offre le sacrifice que Moïse a ordonné »

Deux oiseaux : un sacrifié, l’autre relâché, ou deux agneaux etc … Si vous désirez tous les détails, lire au livre du Lévitique le chapitre 14, verset 1 à 32.

 

Questions-réponses sur Marc 2,1-3,12

 

1,44-3,12 : « Jésus demande le silence tout le temps, lorsqu’il y a guérison ». Pourquoi ?

Vous avez raison : le silence est demandé « aux esprits impurs » (Marc 1,25 ; 3,12), au lépreux (1,44), à Jaïre (5,43)… on peut comprendre pourquoi : malgré la demande de Jésus, le lépreux crie haut et fort et « à cause de cela, Jésus ne pouvait plus se montrer dans une ville » (1,45). La mission du Christ n’est pas de guérir untel ou untel, mais de guérir l’humanité tout entière. Il ne faut pas qu’une guérison particulière empêche le salut universel.

 

2,1 : « On apprit que Jésus était à la maison » … Quelle maison ?

Certainement la maison d’André et de Simon, dont on parle en 1,29, qui a été quittée en 1,35 et où il revient en 2,1.

 

2,9 : Quelle est la réponse à la question posée par Jésus au maître de la loi et pourquoi ?

Humainement parlant, il est plus facile de dire « tes péchés sont pardonnés » que de dire « lève-toi et marche », car dans la seconde parole, tout le monde va voir si le paralysé se lève et marche, ou pas. Donc, dire « lève-toi et marche » oblige à prendre publiquement le risque de montrer que sa parole n’a pas d’efficacité, si du moins rien ne se passe. Tandis que dire « tes péchés sont pardonnés » n’oblige pas à un changement extérieur immédiat. C’est pourquoi cette parole de pardon est plus facile à dire, car elle est accessible à tout le monde.

 

2,10 : Jésus parle-t-il de lui seul ou bien de tous les hommes, lorsqu’il dit « le fils de l’Homme »

Il parle de lui seul en faisant référence à la vision de Daniel 7,13–14. Il évoquera cette vision pour parler de la fin du monde (Mc 14,28) et devant le grand prêtre (14,61–62) où il assimile le Messie au Fils de l’Homme, personnage céleste. Ce sera le motif de sa condamnation à mort (Mc 14,64).

 

 2,17 : Nous avons remarqué une traduction surprenante : « Je ne suis pas venu appeler ceux qui s’estiment justes mais ceux qui se sentent pécheurs ». Comment comprendre ce verset ?

Toute traduction est une interprétation. Quand notre oreille n’est pas habituée, cela nous surprend et nous fait poser des questions nouvelles ; c’est là l’avantage. Mais on peut aussi questionner l’interprétation et c’est ce que vous faîtes avec cette traduction qui psychologise un peu le propos de Jésus. L’Evangile dit en réalité : « Je ne suis pas venu appeler les justes, mais les pécheurs ». C’est net. Si on restait dans le registre psychologiste, on pourrait dire que ceux qui s’estiment justes sont en fait peut-être davantage pécheurs aux yeux de Dieu … Le sentiment ne décrit donc pas toujours la réalité, mais cela dit, il est évident que quelqu’un qui s’estime juste ne se sentira pas concerné par l’appel de Jésus, alors que celui qui se sent pécheur, à raison ou à tort, se sentira au contraire très concerné, et sera dans de meilleures dispositions pour répondre à ses appels.

 

2,18–22 : Quel est le lien entre la scène décrite en 2,18–20 et celle décrite en 2,21–22 ?

L’évocation du vêtement cousu (v21) et du vin (v22) permet de faire comprendre qu’une mentalité ancienne aura du mal à tenir face à une réalité nouvelle. La mentalité ancienne, c’est ce qui est rapporté au v18 (tout le monde jeune et tes disciples ne jeûnent pas …) et la réalité nouvelle, c’est que l’époux lui-même (Jésus) est là. Le jeûne est fait pour se préparer à la venue de l’époux, mais précisément il est venu. Ce que dit Jésus, c’est en gros de savoir discerner ce qui appartient aux temps anciens et ce qui appartient aux temps nouveaux.

 

2,19 : Que veut dire Jésus : Quand le marié leur sera enlevé, ils jeûneront ? Ils pourront où ils devront jeûner ?

Jésus est en quelque sorte l’époux qui a épousé par amour la condition humaine et qui veut épouser toute l’humanité. Tant qu’il est avec ses disciples, dans sa vie de la terre, tout est fête ou devrait être fête. Mais quand il ne sera plus là, il y aura bien un manque, donc les disciples (c’est-à-dire nous) jeûneront. C’est-à-dire qu’ils seront, de fait, privé de sa présence physique, même si par ailleurs, Jésus dit à l’Ascension : « je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la fin du monde » (Matthieu 28,20)

 

2,21 : Comment interpréter le lien entre la réponse de Jésus sur le jeûne et la remarque sur la pièce d’étoffe neuve ou les outres neuves ?

La réponse de Jésus sur le jeûne venait du fait que certains s’étonnaient du comportement inhabituel, nouveau, des disciples de Jésus qui ne jeûnent pas comme les autres. Jésus ne cherche pas à atténuer la différence de comportement entre ses disciples et les autres. Au contraire, il donne la raison la plus profonde à cette différence : c’est qu’avec lui, tout est nouveau. On ne peut donc plus utiliser les anciennes façons de penser ou de se comporter quand on l’accueille, lui qui vient faire « toutes choses nouvelles ». Exactement comme on ne peut pas mettre de vin nouveau dans de vieilles outres …

 

2,23 : Sur le passage des vêtements et des outres, nous en déduisons qu’il faut jeter nos vieux vêtements et nos vieilles outres. Est-ce que « jeter » = se débarrasser du passé ? De notre passé de pécheur ? Sommes-nous des outres ?

Jésus prend des comparaisons tirées de la vie quotidienne ; vous n’êtes donc pas strictement une outre, mais spirituellement parlant, nous contenons bien des idées, des façons anciennes de penser et de vivre qui ne sont pas celles de Jésus. Le problème n’est pas le passé, puisque Jésus dit par ailleurs qu’il n’est pas venu pour abolir, mais pour accomplir la Loi. La question est que le passé est maintenant dépassé. Plus largement, entre le Nouveau Testament (donc l’Evangile, et donc Jésus) et l’Ancien Testament, il y a une continuité (c’est la même Bible), une rupture (d’où les polémiques des pharisiens contre Jésus), ce qui s’explique par un dépassement, ou un accomplissement. Jésus nous invite en fait à tout faire partir de lui !

Questions-réponses Marc 3,13 – 4,34

 

3,14 : Quel sens au nom « Pierre » donné à Simon (étymologie de ce nom) ?

Jésus change le nom de Simon pour préciser sa mission. La tradition juive présentait le monde posé en équilibre sur un rocher (appelé « Shetiyah ») dont le sommet apparaît à Jérusalem, plus précisément au Temple et maintenant sous l’édifice octogonal, appelé justement « dôme du rocher ». Le nouveau monde qu’apporte le Christ repose sur la pierre vivante qu’est le pêcheur de Galilée. Jésus lui dira : « Tu es Pierre, et sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise » (Mt 16,18).

 

3,17 : Pourquoi Jésus nomme-t-il Jacques et Jean «hommes semblables au tonnerre» ? Pourquoi surnommer Jacques et Jean « fils du tonnerre » ?

Le mot « Boanergès » est la transcription grecque du sémitique «bnei» (fils de) et «rgesh » (tumulte), ce qui peut être assimilé au tonnerre. Mais le surnom donné à Jacques et Jean vient plutôt de Luc 9,51-55, épisode où ils veulent, contre la volonté de Jésus, faire descendre le feu du ciel contre les samaritains.

 

3,27 : Qu’est-ce que représente cet homme qu’il faut d’abord ligoter avant de piller sa maison ? Comment rattacher ce paragraphe aux versets 22-26 qui précèdent ?

Je pense que c’est une comparaison que Jésus fait. L’homme fort est en réalité l’esprit mauvais qui possède un malheureux homme, et Jésus vient piller, prendre ce qui appartient à cet esprit mauvais, c’est-à-dire le possédé, pour le rendre à sa liberté bien sûr. Mais pour opérer cette libération, Jésus doit d’abord neutraliser (ligoter) l’esprit mauvais (l’homme fort). C’est par son obéissance permanente au Père, par sa prière, par son amour que Jésus réduit à rien la puissance de l’esprit mauvais et le ligote, ce que ne ferait évidemment pas un esprit mauvais sur un autre esprit mauvais …

 

3,29 : Cette insulte au Saint Esprit ne serait-elle pas le refus de l’homme d’être créature de Dieu et de lui devoir son salut ? Quelle différence entre un péché contre Dieu et un péché contre le Saint Esprit ?

On interprète parfois le péché contre l’Esprit Saint comme le refus de croire au pardon, car on ne voit pas comment pourrait être pardonné celui qui ne croit pas au pardon … L’Esprit Saint est la 3° personne de la Trinité, mais à la différence du Père et du Fils qui sont « extérieurs » à l’homme, l’Esprit Saint est, d’une certaine façon, intérieur au cœur de chaque homme. Le péché contre l’Esprit Saint est donc sans doute un péché contre le don que Dieu nous fait en nous donnant son propre esprit.

 

4,11 : Jésus dit aux 12 qu’ils ont reçu, eux, le secret du Royaume de Dieu. Quel secret ? Comment comprendre alors que Jésus doive leur expliquer les paraboles (4,34) ? Comment comprendre qu’ils n’aient pas compris qui est Jésus (4,41),  sa mission, et qu’ils l’aient même renié ?

Quand il y a une parabole, il y a son sens littéral. Ici, c’est le récit du semeur qui a sa cohérence et tout le monde comprend. Mais une parabole ne se réduit pas à son sens littéral ; elle est porteuse d’un autre sens qui est rarement explicité. Chacun peut avoir son interprétation, mais ceux qui ont l’interprétation de Jésus ont reçu le secret du Royaume. Ici, la parabole du semeur est donnée avec son interprétation, sans doute parce qu’il s’agit de la fécondité de la parole. Les paraboles ne sont pas des devinettes, mais chacune est un enseignement que chercheront ceux qui ont le cœur ouvert. Ce qui est important est non seulement de comprendre les paraboles, mais aussi et surtout de vouloir librement suivre Jésus.

 

4,12 : Comment comprendre ce verset ? Nous sommes allés chercher d’autres passages de la Bible dans l’Ancien Testament et nous avons trouvé Isaïe 6,9-10. Or dans ce passage, Dieu dit à Isaïe : « Rends les insensibles durs d’oreille et aveugles ». N’est-ce pas plutôt l’homme qui refuse de voir et d’entendre ? Pourquoi cette tournure ?

Bien sûr que c’est l’homme qui est responsable de ses refus. Mais à l’époque, on distingue peu les causes secondes (vous, moi…) et la cause première qui est Dieu. Comme on ne veut pas dire que quelque chose (de mal) arrive dans le monde sans que Dieu soit au courant ou l’ait permis, on dit carrément : c’est Dieu qui l’a fait. Dans l’Exode par exemple, on a « Dieu endurcit le cœur de Pharaon »… mais c’est bien sûr Pharaon lui-même qui a prit la décision d’endurcir son propre cœur.

 

 4,25 : Il nous a semblé que c’est quand on a tout donné que l’on est le plus riche et que celui qui veut tout garder n’a finalement rien. Mais peut-on être plus explicite sur le sens de cette hyperbole ?

Vous avez bien compris. On peut ajouter que le propre des biens matériels est d’être limités et qu’il faut les diviser pour les partager entre plusieurs personnes. Tandis que les biens immatériels sont infinis et ne sont pas diminués quand ils sont donnés à d’autres. Ainsi de la connaissance, ainsi de l’amour… donc celui qui est dans la logique des biens immatériels va vers une richesse infinie, tandis que celui qui est dans la logique des biens matériels est dans une logique finie, et se fera effectivement enlever un jour ce qu’il a.

Questions-réponses Marc 4,35 – 6,6a

5,7 : Comment expliquer la parole prononcée par l’homme possédé par des esprits mauvais : « je t’en conjure au nom de Dieu, ne me tourmente pas ! » ?

Quand on est bon, on est tourmenté par le travail des esprits mauvais. Quand on est un esprit mauvais, on est tourmenté par le travail de quelqu’un de bon, comme Jésus. Ici, même si c’est l’homme possédé qui articule sa bouche, celui qui s’exprime véritablement et l’esprit mauvais qui tourmente le pauvre homme, mais ne veut pas être tourmenté….

 

5,11-15 : Est-ce pour cette raison que les juifs ne mangent pas de porc ?

Pour les juifs, le porc n’est pas « kasher » : il est impropre à la consommation, comme l’affirme Lévitique 11,7. Les esprits impurs se retrouveront comme chez eux dans les porcs qui sont des animaux considérés comme impurs, mais ils seront engloutis, avec eux, dans la mer et la mort.

 

5,12 : « Envoie-nous dans ces porcs, laisse-nous entrer en eux ! » Pourquoi Jésus accepte-t-il la requête de Satan ?

Peut-être parce que Jésus est prêt à tout accepter, pourvu que les hommes soient sauvés. Dieu est prêt à tout pour ce salut, quoi qu’il en coûte matériellement parlant, quoi qu’il lui en coûte aussi comme nous le voyons dans la Passion.

 

5,19 : Jésus envoie cet homme raconter ce que le Seigneur a fait pour lui. Est-ce bien parce qu’il s’agit d’un païen qui n’attendait pas le Messie et ne pouvait donc se tromper sur lui ?

Ce païen n’attendait effectivement pas le Messie, mais il aurait quand même pu se tromper sur lui, car il y a eu des faux messies dans l’histoire d’Israël. C’est plutôt qu’un païen n’avait pas à faire authentifier sa guérison par les autorités du Temple, qui constataient la guérison et réintégraient l’ancien malade dans la société. Pour les guérisons des personnes juives, Jésus respecte ce processus.

 

5,37 : Les trois apôtres Pierre, Jacques et Jean accompagnent seuls Jésus ici comme à la Transfiguration et à Gethsémani. Pourquoi ?

C’est une très bonne remarque. Le fait que Pierre, Jacques et Jean soient à chaque fois les seuls apôtres témoins de ces trois scènes, crée un lien entre elles. La Transfiguration de Jésus laisse voir sa gloire qui paraîtra totalement absente à Gethsémani où commence la Passion qui est le passage vers la Résurrection du Christ, qui nous entraîne nous-mêmes vers la Vie. De plus, Deutéronome 19,15 précise qu’il faut 2 ou 3 témoins pour que le témoignage de quelqu’un soit valide. Les 3 premiers apôtres de la liste en Marc 3,16-17 pourront témoigner de ce qu’ils ont vu : Résurrection, Transfiguration, « défiguration » à Gethsémani.

 

5,43 : « MaisJésus leur recommanda fermement de ne le faire savoir à personne… » Comment est-ce possible puisque la maison était remplie de monde à cause du décès ?

Lisez bien : Jésus leur a dit : « elle n’est pas morte, elle dort» (5,39). Voyant la fille remise en forme, la foule peut donc en conclure que le diagnostic de Jésus était le bon. Ainsi, la foule n’est pas témoin d’une « résurrection », par contre les cinq témoins sont invités à ne rien préciser d’autre … ce qui montre bien que Jésus ne cherche pas une réputation spectaculaire, même si ses actes le sont effectivement.

 

 6,5 : « Jésus ne put faire là aucun miracle… » Pourquoi Jésus ne peut-il agir dans son village ?

La réponse est donnée en 6,6 : le manque de foi. Jésus, d’habitude, ne répond à la demande que de ceux qui, d’abord, expriment leur foi (1,16 ; 10,52 etc …)

Questions-réponses Marc 6,6a – 6,56

 6,8 : « Ne prenez rien avec vous pour le voyage sauf un bâton… » Pourquoi ? Cela contredit l’attention de Jésus envers ses disciples, témoignée en d’autres circonstances.

Bien sûr que Jésus connaît les besoins matériels de la vie. Mais cela veut dire que la fécondité de la mission ne reposera jamais sur des moyens humains de puissance (argent, force armée ou autre …) mais seulement sur le fait d’avoir été envoyé et de prêcher au nom de Jésus. De plus, le bâton peut rappeler le bâton de Moïse et d’Aaron qui avait servi tout au long de l’Exode.

 

6,11 : « Secouez la poussière … ce sera un avertissement ». Quel est cet avertissement ?

Peut-être un rappel de la sixième plaie d’Égypte (exode 9,8–12) ou Moïse jette en l’air de la suis qui se change en poussière et provoque des ulcères à tous les Égyptiens ? Cela peut aussi vouloir dire que les disciples n’emporteront rien avec eux, venant d’une terre qui n’a pas voulu accueillir le message du Christ.

 

6,13 : « Ils guérissaient en versant quelques gouttes d’huile sur la tête». Est-ce en lien avec l’onction d’huile des sacrements, en particulier du sacrement des malades ?

C’est en effet un des textes où s’origine l’onction des malades, même si vous voyez que Jésus lui-même n’utilise pas d’huile. Le Créateur agit souvent de manière directe, mais il nous demande d’agir en usant de manière bonne de sa création

 

6,14 : « Hérode se dit : c’est Jean-Baptiste qui est revenu à la vie ». Pourquoi ce récit de la faute d’Hérode et des deux femmes se trouve-t-il à cet endroit de l’Évangile de Marc ?

C’est un artifice littéraire : pendant que Marc raconte la faim de Jean-Baptiste, les disciples sont en mission. Les prédicateurs de la Nouvelle Alliance prennent le relais du dernier prédicateur de l’Ancienne Alliance qui a ouvert la route au Messie.

 

6,30-44 et 8,1-10 : Nous sommes étonnés de ces 2 multiplications des pains. Pourquoi deux épisodes ? Quel est le fond de chacun des récits ? Ils divergent par des détails, des chiffres (5 et 7 pains, 12 et 7 corbeilles, 5000 et 4000 hommes), mais nous avons compris que les détails ne sont pas là par hasard le plus souvent …

Je réponds avec un peu d’avance, en vous félicitant pour votre attention pour ces 2 récits qui paraissent similaires mais ne le sont pas complètement. Le 1° récit (ch 6) concerne les juifs, puisque Jésus est en Palestine. De plus, le chiffre 5 renvoie aux 5 livres de la Torah et nourrit un peuple de 5 x 1000 personnes. (On peut aussi interpréter ce 5000 en 50 × 100, ce qui renvoie encore aux Hébreux organisés par groupes de 50 et de 100 durant l’Exode). Et enfin il reste 12 corbeilles qui représentent les 12 tribus d’Israël. La 2° multiplication (ch 8) se réalise dans le territoire païen de la Décapole, et en faveur des païens. En effet, les 7 pains et les 7 corbeilles renvoient à l’universalité des sept jours de la création, les 4000 personnes renvoient aussi à l’universalité (4 directions, 4 éléments, 4 saisons x1000). Ces deux récits débouchent en quelque sorte sur Marc 8,14-21 où Jésus reprend tous ces chiffres et l’on comprend qu’il n’est, lui, le seul pain véritable temps pour les juifs que pour les païens. Mais nous avons là un peu d’avance …

7,1-3 : Origine de ces prescriptions alimentaires ? Jésus dit être venu pour accomplir et non abolir le Loi. Ces préceptes font-ils partie de la Loi pour les juifs ?

La réponse dépend des prescriptions envisagées. Se laver les mains avant les repas est une tradition juive. Si vous êtes invité à une table juive et qu’on vous propose de « vous laver les mains », répondez positivement et on vous dira comment s’y prendre : alternativement et trois fois. Ici, les juifs ne reprochent pas à Jésus lui-même, mais à ses disciples : « Pourquoi tes disciples mangent-ils leur pain avec des mains impures ? ». Ce qui laisse penser que Jésus lui-même respectait assez exactement la Loi. Mais d’autres préceptes viennent de l’Ancien Testament (ne pas manger le sang par exemple), et les chrétiens ne s’y attachent pas. Pourtant, même si les chrétiens ne les observent pas dans leur littéralité, Jésus a bien accompli et non aboli ces préceptes, car il respecte et nous invite à respecter ce qui est visé par les préceptes de la Loi. Par exemple, pour le sang : « garde-toi de manger le sang, car le sang, c’est l’âme » (Dt 12,23). Et l’âme, c’est évidemment la vie. La signification est donc qu’on ne doit pas dévorer, prendre la vie d’autrui. Jésus a donc bien respecté, et accompli la Loi dans la mesure où il lui a donné son sens ultime.

 

7,10-14 : Nous avons lu et relu ces quelques lignes – nous ne les comprenons pas vraiment.

Des enfants ont des biens de côté pour aider leurs parents âgés. Mais voilà que les enfants ne veulent pas faire des dépenses pour leurs parents, et déclarent donc que ces biens sont maintenant « réservés à Dieu » : on ne peut plus y toucher ! Ainsi, ils font comme s’ils n’avaient pas les moyens d’aider leurs parents et prétextent de réserver à Dieu des biens matériels pour ne pas respecter la Loi qui dit explicitement : « Honore ton père et la ta mère ». Il y a là une hypocrisie que Jésus dénonce.

 

7,27-30 : Comment interpréter ce que Jésus dit à la femme ? En quoi la réponse de la femme montre qu’elle a foi en lui ? Quel lien précis entre la guérison de la fille et la réponse de la mère en 7,28 ? Comment décrypter cette réponse ?

Cette païenne sait que les païens sont considérés comme des chiens (animal impur) par les « enfants » d’Israël. Elle accepte son statut rappelé par Jésus mais demande quand même une dérogation, fusse une miette : cette insistance montre sa foi qui pressent que ce qu’apporte Jésus est tellement surabondant qu’elle peut bénéficier de ce qui déborde de son cœur et de la table des enfants d’Israël pour lesquels Jésus est venu en premier. N’oublions pas que nous sommes entre la multiplication des pains pour les enfants d’Israël (12 paniers) et la multiplication pour les païens (7 paniers). La femme a donc foi dans le fait que Jésus est le Messie d’Israël et que ce Messie d’Israël est venu pour le salut de tous les hommes.

7,33.36 : Pourquoi Jésus conduit-il la personne qui l’a sollicité en dehors de la ville, à l’écart ?

Souvenez-vous : dès Marc 1,40-45, Jésus guérissait un lépreux qui n’a ensuite pas obéi à l’ordre de ne rien dire à personne, de sorte, dit l’Evangile, que « Jésus ne pouvait plus se montrer dans une ville » (1,45). Peut-être est-ce la raison pour laquelle il fait maintenant certaines guérisons à l’écart ?

8,12 :  Pourquoi les gens réclament-ils un signe ? Pourquoi cette difficulté actuellement à croire aux miracles ?

Les gens qui réclament un signe alors qu’il y en a déjà tellement eu auparavant, sont des gens qui en réclameront toujours davantage. Rien ne les satisfera, car la difficulté n’est pas de croire aux miracles (que tout le monde de bonne foi peut constater), mais que les miracles nous conduisent à croire en Jésus. Si on est disposé à croire en la divinité de Jésus, alors les miracles sont des signes réels de l’amour de Dieu pour nous d’une part, et d’autre part, ils nous conduisent à croire davantage en Dieu. S’il n’y a pas accroissement de foi, d’espérance et d’amour, les miracles ne servent à rien …

 

8,15 : Qu’est ce que le levain des pharisiens et le levain d’Hérode ?

Le levain est un ferment. Il me semble que Jésus met en garde ses disciples pour qu’ils ne « fermentent » pas en développant des pathologies religieuses ou des pathologies politiques. Le levain des pharisiens est peut-être une religion qui veut se servir de la politique. Le levain d’Hérode est peut-être une politique qui veut se servir de la religion. Il serait anachronique de parler de laïcité, mais l’avertissement de Jésus ici est répété d’une certaine façon quand Jésus dit : « Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu ». Le Royaume de Dieu est fondé sur un pain sans levain. Déjà, la Pâque juive était célébrée avec des pains azymes, et pour un chrétien, le seul pain qui lève, qui porte une fécondité éternelle, est Jésus, le Pain de Vie.

 

8,17.18.21 … : Jésus semble souvent manquer de bienveillance, d’empathie, de compréhension vis-à-vis de ses disciples. Pourquoi ?

Il y a parfois de quoi. Les disciples (et donc nous aussi) sont tellement englués dans leurs schémas et leurs problèmes qu’ils ne se rendent pas capables de comprendre le sens profond de ce que Jésus réalise. Ils voient des signes, mais il en faut d’autres, et ils passent (et nous aussi) si souvent à côté de l’essentiel … Jésus dira même une fois : « Jusqu’à quand aurai-je à vous supporter ? » (9,19). Pour Jésus qui connaît la lumière parfaite de l’amour, nous devons parfois être bien lourds. Et puis, il ne faut pas oublier : « ceux à qui on a beaucoup donné, il leur sera beaucoup demandé ». Donc Jésus devrait pouvoir attendre davantage de nous.

 

8,24-25 : Pourquoi cette guérison en 2 temps ? Est-ce pour dire qu’on ne peut découvrir Jésus d’un seul coup ? Y a-t-il un rapport entre progression de la foi et progression de la guérison ?

Comme toute guérison, il faut chercher l’interprétation symbolique en la replaçant dans son contexte. C’est en effet curieux que Jésus s’y reprenne à deux fois.

Nous arrivons donc au milieu de l’Evangile de Marc qui a jusque là présenté Jésus comme accomplissant des gestes messianiques : reconstitution d’Israël avec les 12, guérison de tout mal, pardon des péchés, nourrissant les peuples … D’ailleurs, tout de suite après, Pierre reconnaît en Jésus le Messie d’Israël. Mais est ce si clair que cela pour Pierre ?

La guérison de cet aveugle se passe à Bethsaïde qui est précisément la ville de Pierre (cf 1,44). Comme son compatriote aveugle, Pierre commence à « voir » qui est Jésus de Nazareth, mais il ne voit pas encore comment Jésus va accomplir sa mission, et en particulier, il ne voit pas le mystère de la croix. Comme un arbre qui ne peut pas bouger, Pierre est fixé, figé dans son attente d’un Messie triomphant. Il commence à déplacer son regard, mais le chemin de sa transformation va être encore long. Il lui faudra les pleurs de son repentir pour que ses yeux soient lavés de toute cécité (14,29-31 et 66-72).

Même avec nous, le Seigneur est prêt à s’y reprendre à 2 fois, et même bien davantage, pour que nous puissions le voir, lui et son projet d’amour, tel qu’il est.

8,31 :  Pourquoi cette expression : « Le Fils de l’Homme … » ? La phrase « Il faut que le Fils de l’Homme souffre beaucoup » ne pourrait-elle pas signifier que cette souffrance est inévitable mais aussi pleinement acceptée par amour ? (pour éviter de dire que Dieu exige cette souffrance)

Il faut se référer à Daniel 7,13-14 : la vision du Fils de l’Homme, personnage céleste qui vient sur les nuées du ciel. Jésus se désigne ainsi 13 fois en St Marc, suggérant ainsi qu’il vient du ciel. Ce sera d’ailleurs le motif de sa condamnation à mort (14,64).

Par ailleurs, l’expression « il faut » est employée très souvent dans l’Evangile pour évoquer la Passion et ses souffrances … Cela peut donner une impression pénible de fatalité. Mais il y a 2 fois où cette même expression résonne différemment : « Il faut que le monde sache que j’aime le Père et que je fais toujours comme il lui plaît » (Jn 14,31). Cela va dans le sens d’une souffrance acceptée non pour elle-même mais par amour pour le Père et pour nous ! Il y a aussi : « Il fallait que le Christ ressuscite d’entre les morts » (Jn 20,9) qui montre bien que la finalité ultime n’est pas la mort mais la victoire de la Vie sur la mort.

 

8,33 : « Va t’en loin de moi, Satan » … Pourquoi cette réaction envers Pierre ?

La profession de foi de Pierre (« Tu es le Christ ») indique que la 1° moitié de l’Evangile est atteinte (cf Mc 1,1 « Evangile de Jésus, le Christ …») Commence alors la 2° partie (« … le Fils de Dieu ») qui sera la profession de foi du centurion romain à la croix (cf Mc 15,39).

Les disciples, comme leurs contemporains, attendaient un Messie royal et triomphant. Or Jésus, pour la 1° fois, leur dit qu’il sera un Messie rejeté et condamné à l’infamie de la croix (ce sera le thème de la seconde partie de l’Evangile). Donc Pierre réagit de bonne foi : tu es le Messie, donc rien ne peut t’arriver, et tu dois triompher. Il est alors appelé « satan », car en hébreu, « satan » veut dire « adversaire, opposant ». Pierre s’oppose à la marche de Jésus vers la croix. D’où l’image : passe derrière moi, toi qui t’opposes (satan) à ma marche vers Jérusalem où je dois mourir et ressusciter.

 

8,35 : « Celui qui veut sauver sa vie la perdra » … Que comprendre ?

C’est plus une affirmation ou un enseignement qui signifie qu’on ne trouve le sens de sa vie que dans le don, car la phrase se complète ainsi : « qui perdra sa vie pour moi et pour l’Evangile la sauvera ». Le parallélisme est parfait !

 

8,38 : Pourquoi, si quelqu’un a honte de Jésus et de ses paroles face aux gens d’aujourd’hui, le Fils de l’Homme aurait-il honte de lui, quand il viendra dans la gloire de son Père ? Est-ce notre attitude envers les sujets sociétaux : lois bioéthiques, avortements, changements sociaux ?

C’est une question de vérité dans la relation. Si quelqu’un a honte de Jésus, il se met à distance de lui, par exemple en disant : « je ne le connais pas, je ne sais pas … » Eh bien, c’est cette distance que nous créons que nous retrouverons aussi de l’autre côté, un peu comme dans l’histoire du pauvre Lazare (Lc 16,20ss). Jésus n’évoque donc pas ici des sujets sociétaux, mais il nous avertit sur le positionnement que nous prenons par rapport à lui. Ailleurs, il se présente comme « le Chemin, la Vérité et la Vie » (Jn 14,6), donc notre positionnement sur ces sujets façonne d’une certaine façon notre positionnement par rapport à lui.

 

9,1 : « Quelques uns ne mourront pas avant d’avoir vu le Royaume de Dieu » Que signifie ce verset ? Qu’entend Jésus quand il parle du Royaume de Dieu ? A certains moments, il dit que le Royaume est déjà là ; à d’autres, il l’annonce comme devant venir ; Marc veut-il dire, comme certains le croyaient, que la venue du Christ dans la Gloire était imminente ?

Certains croyaient effectivement que la venue du Christ dans la gloire était imminente, mais cette croyance s’était développée APRES la Résurrection. Quand Jésus prononce cette phrase, nous sommes avant la mort et la Résurrection de Jésus, et sa citation exacte est : « quelques uns de ceux qui sont icine mourront pas … » Cela nous oriente vers la signification suivante : Jésus lui-même est le Royaume. Le Royaume n’est pas un pays géographiquement délimité ou un lieu du ciel. C’est plutôt une amitié, une relation vivante avec Jésus. Le dialogue entre Jésus et le bon larron nous éclaire : « Souviens-toi de moi quand tu viendras AVEC ton Royaume » demande le bon larron. Et Jésus lui répond : « Aujourd’hui, tu seras AVEC moi dans le paradis » (Lc 23,42-43). Le Royaume est devenu « moi », c’est-à-dire « Jésus » !

 

9,2 : Pourquoi est-il précisé : « 6 jours après » ? Après quoi ? Est-ce une allusion à la fête des Tentes qui commençait 6 jours après la fête du Grand Pardon ? D’où la remarque de Pierre qui veut dresser 3 tentes ?

Ici, on peut comprendre le 7° jour APRES la profession de foi de Pierre, ce qui permet d’évoquer une semaine. Ou bien on peut comprendre le 6° jour DEPUIS le Yom Kippour (Grand Pardon). Celui-ci a en effet lieu le 10 du mois de Tishri tandis que Soukkot (Les Tentes) a lieu le 15 du même mois. Cette 2° hypothèse permet de lier les grandes fêtes juives du Nouvel An (Rosh Hashanah) :

–       A Yom Kippour, le Grand Prêtre appelait Dieu par le Nom révélé à Moïse, comme Pierre va nommer qui est Jésus : le Messie

  • A Soukkot, on dresse les Tentes, ce que Pierre propose

–        

9,11-13 : Elie dont parle Jésus et qui est déjà venu serait Jean Baptiste ? « Elie doit venir tout remettre en ordre » Peut-on comprendre l’annonce de la fin du monde ? Quelle est la signification du passage où on parle de la venue d’Elie ?

Dans la tradition juive, le prophète Elie doit précéder le Messie. C’est pourquoi, à la croix, on pense que Jésus appelle Elie (cf Mc 15,35-36). Chaque année, sur la table du repas pascal, certaines familles juives placent une coupe de vin pour Elie … au cas où il arriverait ce soir-là en annonçant enfin l’arrivée du Messie. Ce n’est donc pas la fin du monde ; c’est plutôt l’ultime préparation d’un peuple « bien disposé », qui ramène « le cœur des pères vers leurs fils, et le cœur des fils vers leurs pères » (Mal 3,24), comme le dit le tout dernier verset de l’Ancien Testament. C’est l’Evangéliste Matthieu qui donne la clef : « Elie est déjà venu … Ils comprirent qu’il leur parlait de Jean Baptiste » (Mt 1,12-13). Et en effet, celui-ci a bien été l’ultime préparation, le précurseur, avant la venue du Messie.

 

9,15 : Pourquoi les gens sont-ils très surpris de voir Jésus ?

Peut-être les gens sont-ils surpris de voir Jésus, simplement parce qu’ils ne savaient pas qu’il était à proximité ? Pour rappel, l’épisode qui précède est la Transfiguration où Jésus n’avait pris avec lui que Pierre, Jacques et Jean. Peut-être qu’il faut comprendre le mot « surpris » dans son sens premier, non pas « étonnés », mais « pris sur » le vif de leur conversation avec les scribes ?

9,28 : « Pourquoi n’avons-nous pas pu chasser cet esprit » ? Pourquoi ce contraste en l’envoi par Jésus des disciples en mission et ce résultat, constat d’échec ?

Il y a vraiment un apprentissage de la mission chez les apôtres, et leurs « échecs » sont l’occasion d’en apprendre davantage. Peut-être ont-ils grandi en humilité à cette occasion ? En tous cas, ils ont fait l’expérience que le pouvoir que Jésus leur donne d’expulser les démons n’est pas un truc utilisable à volonté ; cela dépend de leur union à Dieu, c’est-à-dire notamment de la prière …

9,29 : De quel genre d’esprit s’agit-il ? Y a-t-il plusieurs genres d’esprit ? Pourquoi est-ce seulement « par la prière que l’on peut faire sortir ce genre d’esprit » ?

Je ne suis pas spécialiste de la question, mais l’existence de plusieurs genres d’esprit semble en effet résulter de la réponse de Jésus. S’il connaît bien ces puissances spirituelles, Jésus sait aussi que Dieu est plus fort que tous les esprits qui sont simplement des créatures. Si nous ne pouvons pas expulser par nous-mêmes certains esprits, la prière peut toucher le cœur de Dieu qui exercera alors par amour pour nous sa puissance en les faisant sortir. Dès Mc 1,23, on voit que dans la catégorie générale des esprits mauvais, il y a plusieurs sortes d’esprit qui n’agissent pas tous de la même façon, comme les humains au demeurant …

Questions-réponses sur Marc 14,43 – 14,72 

14,51 : (L’arrestation de Jésus). Comment interpréter la venue de ce jeune homme, alors que tous les disciples s’enfuient ? Le drap et la nudité de cet homme sont-ils à rapprocher du Christ en croix et du linceul ?

Il ne me semble pas qu’il faille faire un rapprochement entre le Christ et ce jeune homme. On pense souvent que ce jeune homme est en fait Marc lui-même qui raconterait donc sa propre fuite que les autres évangélistes taisent, soit parc e qu’ils n’étaient pas là eux-mêmes, soit par charité …

 

14,53 : Pourquoi est-il vêtu d’un simple drap ? Avec ce jeune homme, pouvons-nous y voir un parallèle avec Adam qui s’enfuit du jardin d’Eden ?

C’est suggestif. Faîtes les ressemblances et les différences. Dans les 2 cas, il y a bien un jardin et de la nudité dans l’air … Mais Dieu fait un vêtement à Adam alors que le jeune homme abandonne son vêtement … peut-être en attendant que le Christ le recouvre d’un vêtement nouveau ?

 

14,62 : « JC révèle qu’il est le Fils de Dieu ». Fin de sa mission terrestre ?

La fin (chronologique) de sa mission est sur la croix ou au tombeau. La fin (au sens finalité) de sa mission est notre salut. Cela se rapproche de votre proposition, car le salut, c’est de reconnaître que Jésus a été envoyé par Dieu son Père, et qu’il a donné sa vie pour nous.

 

14,63 : « Le grand prêtre déchire son vêtement ». Signification de ce geste ? Comment expliquer le geste du grand prêtre qui déchire le vêtement de Jésus au moment où le sort de Jésus semble réglé ?

Déchirer son vêtement est un geste spectaculaire pour déclencher l’émotion et frapper l’imagination. Ce geste n’est pas liturgique ou réservé au grand-prêtre, mais il signifie solennellement la détresse absolue de quelqu’un face à une situation ou une parole irréversible, irréparable. Ainsi par exemple, quand Ruben constate que son frère Joseph n’est plus dans la citerne d’où il voulait le faire sortir (Gn 37,29) … Ce geste peut finir par devenir une sorte de mise en scène, et c’est pourquoi le prophète Joël avait dit « Déchirez vos cœurs, et pas vos vêtements » (Jl 2,13). Là, le grand-prêtre veut exprimer qu’il considère que Jésus a prononcé une parole irréversible, irréparable, qui scelle sa condamnation.

 

14,71 : « Reniement de Pierre : Que Dieu me punisse … » Comment cette demande a-t-elle été entendue par Dieu ? Pierre est pourtant devenu le 1° pape ! Il est mort martyrisé.

La traduction est de fait étrange. Le mot à mot, c’est : (Pierre) commença à maudire et à jurer : « Je ne connais pas cet homme dont vous parlez ». Pierre est bien devenu celui qui fait paître les brebis du Seigneur, mais après avoir accueilli la triple miséricorde du Seigneur qu’il avait renié trois fois !

Questions-réponses sur Marc 15,1 – 15,47

15,10 : « Les prêtres avaient livré Jésus par jalousie. Ils poussèrent la foule à demander la libération de Barabbas ». Responsabilité des grands-prêtres ?

Responsabilité juridique des grands-prêtres alors en fonction, mais il ne faut pas imputer cette responsabilité à tous les grands-prêtre de toutes les époques. Et surtout, il ne faut pas oublier que Jésus a choisi de donner sa vie par amour pour les pêcheurs (c’est-à-dire pour tous les hommes, donc pour nous aussi bien sûr).

 

15,13 : « Réponse de la foule à Pilate qui voulait libérer JC : cloue-le sur une croix ». Qui a tué Jésus ? Responsabilité de la foule (peuple juif) au sens historique de l’évènement ? Responsabilité de nous tous chrétiens de tous les temps, quand nous péchons, sens spirituel ?

La responsabilité première de la mort de jésus réside dans le péché des hommes, de tous les hommes de tous les temps. Personne ne peut donc s’en exonérer. Cette affirmation est spirituelle et a aussi une dimension historique, car nous vivons bien notre vie, sainte ou de péché, dans une histoire concrète d’une part, et que Jésus est bien mort à moment précis de l’histoire également.

Mais il y a aussi la question seconde (pas secondaire) de la responsabilité juridique (et historique, au sens de ce qui s’est passé « sur le moment ») de la mort de Jésus. Là, il faut lire les Evangiles de la Passion qui dessinent les défaillances successives des différents intervenants :

–       Pilate : Sa responsabilité est décisive, puisqu’il avait le pouvoir de mettre à mort ou de sauver Jésus, comme il le dit lui-même (Mt 19,10). C’est bien Pilate qui prononce l’acte de condamnation, après s’être publiquement lavé les mains en disant : « Je ne suis pas responsable de ce sang, à vous de voir » (Mt 27,24)

  • La foule : Elle réclame à Pilate la mort de Jésus et demande la libération de Barabbas. Peut-être la foule a-t-elle été manipulée, mais elle porte sa part de responsabilité, comme chacun de nous quand nous crions avec les autres …

–       Les grands-prêtres et le Sanhédrin : Ce dernier n’était pas unanime, puisque Nicodème et Joseph d’Arimathie étaient pour Jésus. De plus, par souci de vérité et pour contrer l’antisémitisme, l’Eglise rappelle que « ce qui a été commis durant la Passion ne peut être imputé indistinctement à tous les juifs vivants alors, ni aux juifs de notre temps » (Vatican II, Nostra Aetate 4). Mais au témoignage des Evangiles, des grands-prêtres et des anciens ont poussé à la mort du Christ (Mt 27,1.12.20 …) et ont donc une part de responsabilité, plus précisément d’ordre religieux.

 

15,25-34 : Précision des heures ? Nous avons recherché. Les heures des prières juives se situaient à la 3° heure, la 6° heure et la 9° heure après le lever du soleil ? Nous avons vu que le rituel du sacrifice de l’agneau se faisait à la 9° heure, heure de la mort de Jésus. St Jean parle de la condamnation de Jésus à la 6° heure et il semble que les sacrifices d’agneaux commençaient à cette heure là lors de la fête de la Pâque ? Nous avons aussi trouvé un passage du livre d’Amos qui parle de l’obscurité que Dieu fera surgir en plein midi (6° heure) et que ce jour sera comme un deuil de fils unique (Amos 8,9-10)

Bravo pour vos recherches. En effet, les heures sont comptées en gros à partir de 6h du matin. Donc la 3° heure correspond à 9h du matin, la 6° heure correspond à midi, et la 9° heure à 3h de l’après-midi. Le passage d’Amos que vous citez est à rapprocher de l’Evangile selon St Matthieu (lu l’an dernier) : « à partir de la 6° heure, l’obscurité se fit sur toute la terre, jusqu’à la 9° heure » (Mt 27,45).

Par ailleurs, les prières juives de la 3°, 6° et 9° heure ont été reprises dans le monde monastique avec les prières de tierce, sexte et none … Un lien de plus entre judaïsme et christianisme.

 

15,33 : « A midi, l’obscurité se fit sur tout le pays et dura jusqu’à trois heures de l’après-midi ». Quelle est la signification de ce phénomène ?

La question n’est évidemment pas météorologique ou astrale. Vous vous souvenez peut-être que dans le Credo, on dit à propos de Jésus qu’il est « Dieu, né de Dieu ; lumière, né de la lumière ; vrai Dieu, né du vrai Les témoins de la Passion ont dû constater ce phénomène qui est rapporté sans être contesté. Mais le fond de votre question n’est pas météorologique ou astrale. Peut-être vous souvenez-vous que dans le grand Credo, on dit à propos de Jésus qu’il est « Dieu, né de Dieu ; lumière, né de la lumière ; vrai Dieu, né du vrai Dieu ». Alors, quand l’auteur de la lumière est mis à mort, comment la lumière elle-même pourrait subsister ? Elle est comme obligée de s’éclipser devant la mort de son créateur. Comme le dit St Jean, « la lumière est venue dans le monde et les hommes ont préféré les ténèbres à la lumière » (Jn 3,19).

 

15,34-35 : Où sont St Jean et Marie dont seul l’Evangile de Jean évoque la présence au pied de la croix ? Pourquoi ce dernier est-il le seul à en parler ? Pourtant, Marc a parlé de la fuite de tous les disciples …

A mon avis, si Jean est le seul à en parler, c’est d’une part pour des raisons théologiques (Marie et Jean représentent l’Eglise fidèle qui reste avec Jésus dans les épreuves), et d’autre part pour une raison historique : Jean était le seul apôtre présent ; il est donc un témoin direct. D’ailleurs, il ne cite pas son nom, mais il se nomme « le disciple que Jésus aimait » (Jn 19,26), sans doute par humilité et aussi pour nous montrer que mystérieusement, Jésus aime particulièrement ceux qui restent proches de lui dans sa Passion.

 

15,35 : « Eloï, Eloï, lema sabactani ». Pourquoi les juifs présents, qui connaissaient la prière citée par JC ont-ils cru comprendre qu’il appelait Elie ?

Il y a la similitude phonétique : « Eloï » et « Elie ». Il y a peut-être la difficulté de comprendre les paroles d’un crucifié agonisant. Il y a peut-être aussi de la dérision, comme le montre le verset suivant …

 

15,38 : Le rideau du Temple se déchire de haut en bas. Ce rideau séparait le Saint des Saints, lieu de la présence de Dieu où le grand-prêtre ne rentrait qu’une fois par an, du reste du Temple. Cela veut-il dire que Dieu devient « accessible » à toute l’humanité ?

A ma connaissance, toutes les religions ont des systèmes de séparation pour séparer le profane du sacré, vers lequel on s’approche par degrés. C’est vrai aussi dans le Temple de Jérusalem où les différents espaces accueillent de moins en moins de monde, et où il faut de plus en plus faire des rites de purification. Mais même si le contact était limité à une fois par an pour le seul grand-prêtre, on peut dire que Dieu avait quand même voulu se rendre accessible, puisque c’est lui qui avait donné le modèle de la Tente de la Rencontre, et après du Temple qui était structuré en gros de la même façon. Simplement, avec Jésus, ce n’est plus d’abord l’homme qui se rapproche de Dieu, mais Dieu qui se fait proche des hommes, au point qu’il devient homme comme nous. Avec l’Incarnation, Dieu se rend déjà totalement accessible. Vous en avez un indice par le fait qu’au baptême de Jésus, les Cieux « se déchirent » (Mc 1,10) comme le rideau du Temple (Mc 15,38). C’est le même mot qui est employé en grec, mais dans votre livret, il a été traduit par deux mots différents (« s’ouvrir » en Mc 1,10). Du coup, l’ancienne Alliance n’a plus de raison d’être, car elle préparait cette proximité inouïe de Dieu et de l’homme.

 

15,43-46 : Joseph d’Arimathie demande courageusement le corps de JC à Pilate … il l’enveloppa dans le drap ». Quelle est la signification de ce tissu ? Il est précisé qu’il s’agit de lin.

C’est le rite funéraire qui est observé, même à la hâte. Le mot grec pour ce drap est « syndone » qui a donné « sudarion » qui a donné « suaire »

Questions-réponses sur Marc 16,1 – 16,20

16,7 : Il nous semble que ce rendez-vous de Jésus avec ses disciples en Galilée, carrefour des nations, et non à Jérusalem, veut signifier que la Bonne Nouvelle doit être annoncée au monde entier ?

Chez Marc, qui met par écrit la prédication de Pierre, c’est bien le cas. Chez Luc, qui a la réputation d’être plus universel, l’Evangile commence dans le Temple et finit dans le Temple … Au total , il faut tenir deux choses indissociables : La mission que le Christ donne d’aller dans le monde entier n’empêche pas que la racine de notre foi soit juive ; et c’est précisément cette racine juive qui est appelée par Jésus à s’étendre au monde entier, par la prédication des apôtres et l’exemple d’une vie remplie de charité de tous les disciples.

 

16,8 : Comment expliquer que l’Evangile de Marc se termine ainsi (puisqu’on rapporte que la suite a été écrite par d’autres et rajoutée) : perte du manuscrit ? Volonté de Marc ?

A votre question, on ne peut sans doute répondre que par des hypothèses. Celles que vous proposez peuvent convenir. On peut aussi considérer la distinction entre « auteur » et « éditeur » : Marc a pu écrire en plusieurs moments, et un éditeur a pu réaliser l’édition de son Evangile en ajustant au mieux des textes pas complètement finalisés … En fait, ce qu’on n’a pas complètement aujourd’hui, c’est l’histoire de la rédaction des Evangiles ; ce serai pourtant très intéressant d’un point de vue historique et scientifique. On a juste le texte tel qui se présente aujourd’hui, et c’est encore cela le plus décisif pour notre vie spirituelle.

 

16,16 : « Celui qui croira sera sauvé ; celui qui ne croira pas sera condamné ». Dieu ne peut pas condamner ? Nous comprenons que celui qui refuse de croire s’exclut lui-même en se mettant à l’écart, donc se condamne ?

Exact ! Simplement, la formulation permet un beau parallélisme qui a plus d’impact et est plus facile à retenir, mais votre interprétation est la bonne.

 

16,16 : Comment comprendre la 2° partie de la phrase : « celui qui ne croira pas sera condamné » : nous avons tous dans nos entourages, dans nos familles même, des personnes qui ne croient pas sans être dans un refus mais qui n’arrivent pas à croire alors même qu’elles ont été baptisées. Cette phrase résonne douloureusement dans nos cœurs. Il est difficile de penser qu’elles seront condamnées sans que ce qu’ils auront fait de leur vie soit regardé par le Seigneur. La foi est un grand mystère …

Par ailleurs, comment Dieu peut-il condamner des hommes et des femmes qui ne croient pas mais en toute conscience car Jésus ne leur a pas été annoncé ? Nous pensons qu’ils seront jugés sur leur conscience et l’amour qu’ils auront donné. Ne pourrait-on pas plutôt dire que cette injonction est une demande expresse du Seigneur à nous croyants d’aller annoncer l’Evangile à tous ?

Quelles questions ! Mais en effet, pour éviter la difficulté que vous soulevez, certaines traductions disent «  … celui qui refusera de croire sera condamné », ce qui n’est pas littéral, mais juste quand même. En effet, dans le cas de ceux qui n’ont pas entendu la Bonne Nouvelle, le Concile de Vatican II dit qu’il est quand même offert « à tous les hommes, d’une manière que Dieu connaît, la possibilité d’être associé au mystère pascal » (Gaudium et Spes 22,5), c’est-à-dire d’être sauvés. Pour ceux qui ont entendu la Bonne Nouvelle, il peut y avoir une multitude de cas différents : ceux qui ne comprennent pas, ceux qui ne cherchent pas, ceux qui ne rencontrent pas de chrétiens crédibles qui vivent dans leur existence le message de l’Evangile, ceux qui croient et vivent l’Evangile mais ne savent pas comment le dire … Il peut y avoir aussi ceux qui, en connaissance de cause, ont compris, ont vu la beauté du message de Jésus, mais ont librement fait le choix de ne pas croire et de ne pas suivre les appels du Christ et de leur conscience. Dieu nous a donné une liberté qu’il respectera toujours, car on ne peut pas forcer à croire ou à aimer. Il est donc possible de refuser le salut que Dieu propose à tous les hommes. Mais confiance, Dieu est juste et bon, il connaît tous les cœurs et il « veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la Vérité » (1Tim 2,4). De plus, au soir de notre vie, tous les hommes seront jugés sur l’amour (St Jean de la Croix).

Par ailleurs, vous avez bien vu l’enjeu de l’annonce de la Bonne Nouvelle par tous les chrétiens qui sont tous appelés à être disciples, et ont donc la responsabilité d’annoncer par leurs actes et leurs paroles cette Bonne Nouvelle d’un Dieu juste et bon, et du Christ Jésus qui est mort et ressuscité pour notre salut.

 

16,17-18 : Ce commentaire a-t-il une dimension eschatologique plus qu’une promesse pour les croyants dans leur vie présente ?

On peut distinguer mais pas opposer les deux (eschatologie ou vie présente), car depuis la Résurrection et le don de l’Esprit Saint, la dimension eschatologique est désormais présente dans la vie des croyants. Cela veut dire que nous devrions tous vivre en sachant, en croyant que Jésus a effectivement inauguré le temps du Royaume ; si nous le croyons effectivement et vivons donc concrètement en fonction de cela, alors, nous contribuerons du coup à la venue du Royaume. On voit cela parfois dans la vie des saints ; ils vivent comme si le Royaume était déjà là, parce qu’ils vivent avec Jésus. Comme la vie du monde n’est pas terminée, il y a des résistances, des péchés, et ils connaissent souvent la souffrance, mais par leur vie, ils contribuent à la venue d’un monde meilleur, réconcilié. En fait, il devrait y avoir plus d’eschatologie dans la vie des croyants.

Merci d’avoir posé cette ultime question !